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Aide départementale à une entreprise en difficulté

Billet 2001-04-20

Sur la possibilité d’une collectivité territoriale (un département) d’apporter une aide à une entreprise en reprenant une autre en difficulté.

C’est l’article L. 3231-3 du code général des collectivités territoriales qui autorise les départements à aider les entreprises en difficulté comme à intervenir sur le plan économique pour satisfaire les besoins de la population en milieu rural. Et il est précisé par ce texte que les règles sont les mêmes dans les deux cas.

Il est certain que l’existence d’une procédure collective devant un tribunal de commerce démontre suffisamment les difficultés d’une entreprise. Mais il faut que cette procédure en soit à la phase de redressement et non pas à celle de la liquidation car alors l’entreprise est condamnée et l’on voit mal le fondement de l’aide publique.

Et l’on sait que l’issue (réussie) d’un redressement judiciaire peut prendre deux formes qui sont différentes.

  • Soit un « plan de continuation » est adopté par le tribunal et alors l’entreprise continue d’exister sur le plan juridique : c’est toujours la même personne. Dans ce cas, le département peut apporter une aide à une entreprise clairement en difficulté, dès lors que les autres conditions fixées par la loi sont remplies.
  • Soit le tribunal retient un « plan de reprise » et alors l’entreprise est cédée à un repreneur qui est une personne juridiquement distincte que l’on ne peut considérer comme étant en difficulté puisqu’elle n’est pas l’objet d’une procédure collective. Si l’on s’en tient à la notion de la personne en difficulté (approche juridique), l’on sera conduit à conclure à l’impossibilité pour un département de fournir une aide au repreneur. Mais si l’on retient une approche plus économique qui prend en considération l’entreprise, l’on peut admettre une aide au repreneur.

Et il faut noter un cas de jurisprudence cité dans le CGCT (édition LITEC) sous l’article L. 3231-3 : « Est illégale la délibération d’un conseil général qui prévoit l’attribution d’aides directes à des commerçants ou artisans désireux de reprendre une activité en milieu rural, dès lors qu’elle ne définit pas les services dont le maintien est nécessaire à la satisfaction des besoins de la population, et ne se fonde pas sur l’absence ou la défaillance de l’initiative privée (TA Dijon, 1er octobre 1985, Préfet, COREP de la Saône-et-Loire ; Rec. CE, T, p. 620). ». L’argument qui est ici développé pour fonder la nullité de la délibération est l’absence de motivation estimée sérieuse au regard des critères fixés par la loi. Mais le cas d’une reprise d’activité est clairement visé, même s’il n’est pas certain qu’il s’inscrive dans le cadre d’une procédure collective.

Si l’on se reporte à la circulaire (n° 82-102 du 24 juin 1982) du ministère de l’Intérieur que vous m’avez communiquée, l’approche purement juridique d’identité de la personne bénéficiant de l’aide n’est pas exigée. Et l’on peut en citer deux extraits à cet effet :

  • dans « contrôle administratif, au premier alinéa » : « b) l’intervention n’est possible que lorsqu’il s’agit de contribuer au redressement d’une entreprise en difficulté. » ;
  • toujours dans la même partie, mais plus loin : « On ne saurait se limiter aux seuls critères juridiques pour définir une entreprise en difficulté, sauf à priver la loi de l’essentiel de sa portée. ».

En d’autres termes, il semble possible d’admettre que l’aide d’un département à une entreprise en difficulté soit consentie à un repreneur. Bien entendu, il faut supposer que les autres conditions exigées (convention avec l’entreprise, existence d’intérêts économiques et sociaux de la population…) auront été satisfaites.

Pour autant, il reste à savoir si un accord conclu directement entre la collectivité et un repreneur (pressenti ou choisi) est la meilleure façon de faire. C’est que le choix de celui-ci incombe normalement au tribunal de commerce qui mène la procédure de redressement et que les repreneurs évincés pourraient argumenter une rupture de l’égalité ou de la concurrence. Aussi est-il sans doute préférable, pour la collectivité territoriale, de passer par l’intermédiaire du tribunal de commerce. Il s’agirait, pour le département, de monter le dossier d’aide dans les formes requises avec l’entreprise en difficulté à charge pour le tribunal de commerce de décider d’un plan de reprise ou de continuation. En tout état de cause, l’aide accordée à l’entreprise (au sens économique du terme) lui bénéficierait en propre (cas du plan de continuation) ou serait versée à une autre personne (plan de reprise) selon la décision prise par le tribunal de commerce. Cette façon de faire présente deux avantages décisifs :

  • Le département contracte avec une entreprise dont il est certain qu’elle est en difficulté, même si l’aide est versée à une personne juridiquement distincte.
  • Le choix de la personne qui encaissera effectivement l’aide publique est effectué par le tribunal de commerce.

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