La note 38 – novembre 2003
D’abord mandataires des actionnaires chargés de leur permettre de se prononcer sur les comptes sociaux, les commissaires aux comptes ont été progressivement investis d’une mission d’intérêt général au profit non seulement des actionnaires mais aussi de toutes les personnes (créanciers, fournisseurs, banquiers …) qui ont à apprécier la situation financière de l’entreprise et qui, pour cela, doivent pouvoir se fier à ses documents comptables et financiers.
Les entreprises soumises au commissariat aux comptes
Au terme de nombreuses évolutions législatives, les entreprises tenues à la désignation d’un ou de plusieurs commissaires aux comptes sont, en résumé, les suivantes :
- les sociétés par actions, qu’elles soient anonymes (S.A.), simplifiées (S.A.S.) ou en commandite (S.C.A.) ;
- les personnes morales de droit privé exerçant une activité économique, si elles dépassent deux des trois seuils suivants : 50 salariés, 1,55 million d’euros de total de bilan et 3,1 millions d’euros de chiffre d’affaires ;
- les associations qui reçoivent des subventions publiques pour plus de 150.000 euros par an.
Le statut du commissaire aux comptes
Seules les personnes physiques ou morales inscrites sur une liste spéciale, dressée par cour d’appel, peuvent exercer les fonctions de commissaires aux comptes. Il y faut :
- une qualification, assurée par des examens professionnels pour exciper de ce titre, des normes et une déontologie professionnelles et un contrôle confraternel d’activité,
- une indépendance qui résulte de l’incompatibilité de ce mandat légal avec tout autre activité (l’expert-comptable, le conseil ou l’administrateur d’une entreprise ne peut en être commissaire aux comptes) ainsi que d’une définition légale de ce mandat qui n’est pas divisible ni ne peut être restreint.
Le commissaire aux comptes est désigné par l’assemblée générale (ou dans les statuts) pour une durée de 6 ans.
Un programme de travail est établi qui décrit les diligences nécessaires, indique le temps à y consacrer et les honoraires correspondants. Les honoraires sont pris en charge par l’organisme contrôlé, après négociation des tarifs.
La certification des comptes annuels
La mission principale du commissaire aux comptes consiste « à certifier que les comptes annuels sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du résultat, de la situation financière et du patrimoine de l’entreprise ». La régularité est la conformité aux règles et procédures en vigueur. La sincérité est l’application de bonne foi des règles, en fonction de la connaissance que les responsables des comptes ont normalement de la réalité et de l’importance des opérations, événements et situations.
Le commissaire aux comptes présente à l’assemblée générale ses conclusions, dans un rapport général qui comprend deux parties :
- opinion sur les comptes annuels ; l’on distingue ici la référence aux contrôles menés et l’expression de l’opinion sur les comptes annuels (cf. ci-dessous) ;
- vérifications et informations spécifiques : à ce titre, le commissaire s’assure de la sincérité des informations fournies par les dirigeants aux membres de l’assemblée et de leur concordance avec les comptes.
L’opinion sur les comptes est exprimée en conclusion de la première partie du rapport et ne peut être que l’une des suivantes :
- certification pure et simple : les comptes sont certifiés réguliers et sincères et donner une image fidèle de la situation financière, du résultat et du patrimoine de l’entreprise ;
- certification avec réserve(s) : la réserve est l’absence de certification, limitée à un point particulier des comptes; le rapport précise la nature des erreurs, limitations ou incertitudes qui ont conduit à la réserve, avec leur estimation ;
- refus de certification ; il a été constaté des erreurs, des anomalies ou des irrégularités dans l’application des règles et principes comptables suffisamment importantes pour affecter la validité d’ensemble des comptes ou bien encore des incertitudes affectant les comptes dont la résolution dépend d’événements futurs et dont l’importance est telle qu’il n’est pas possible de donner une opinion sur l’ensemble des comptes.
Le commissaire peut alors avoir à saisir le procureur de la République pour présentation ou publication de comptes ne donnant pas une image fidèle.
La procédure d’alerte
La procédure d’alerte est déclenchée lorsque le commissaire aux comptes relève tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation.
Ces faits concernent la situation financière, économique et sociale et constituent des événements de nature objective, survenus ou pouvant survenir, susceptibles d’affecter la poursuite de l’activité dans un avenir prévisible.
La procédure comprend 4 phases.
- Le commissaire demande aux dirigeants, par écrit, des explications sur les faits constatés. Leur réponse intervient, sous quinzaine, par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle contient l’analyse des difficultés et indique éventuellement les mesures envisagées.
- À défaut de réponse, ou si elle ne permet pas d’être assuré de la continuité de l’exploitation, le commissaire invite, par écrit, le président ou le directoire à réunir le conseil d’administration ou de surveillance.
Un extrait du procès-verbal de la réunion est adressé au commissaire et au comité d’entreprise dans le mois qui suit cette réunion.
Le Président du tribunal de commerce est informé que la procédure a été déclenchée et que le conseil s’est ou non réuni.
- En cas d’inobservation de ces dispositions, ou si la continuité de l’exploitation reste compromise, le commissaire établit un rapport spécial, présenté à la prochaine assemblée générale (et communiqué au comité d’entreprise).
- Si, après l’assemblée générale, le commissaire constate que les décisions n’assurent pas la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le Président du tribunal de commerce et lui en communique les résultats.
Les limites de la mission du commissaire aux comptes
Le commissaire aux comptes est tenu au secret professionnel pour tous les faits, actes et renseignements connus à raison de ses fonctions. Cette obligation restreint la communication entre le commissaire et l’entreprise contrôlée :
- le secret ne vaut pas dans les relations du commissaire avec les organes de gestion de l’entreprise; si le commissaire peut librement communiquer avec le représentant légal de l’entreprise ou en séance du conseil d’administration, en revanche il ne peut le faire avec un administrateur ;
- l’assemblée générale ne peut se voir opposer de secret mais seulement pour les conclusions du contrôle de l’information financière afin qu’elle puisse se prononcer en toute connaissance de cause.
- Le commissaire aux comptes est délié du secret professionnel vis-à-vis des autorités judiciaires (notamment le procureur de la République du fait de l’obligation de lui révéler les faits délictueux dont il a eu connaissance) et des Chambres régionales des comptes.
Les fonctions et les responsabilités de gestion et de contrôle assurées respectivement par les dirigeants et l’organe de contrôle qu’est le commissaire aux comptes sont nettement distinguées. La loi interdit au commissaire aux comptes de prendre part à la gestion. Ceci vaut pour tous actes de gestion comme pour l’expression de jugements de valeur, critiques ou élogieux, sur la conduite de la gestion en son ensemble ou dans ses opérations particulières.
Cette interdiction ne réduit pas l’information du commissaire aux sur la gestion : cette information est indispensable à l’exercice de son mandat.
Ce qu’il faut retenir
Le commissaire aux comptes est un professionnel indépendant de la comptabilité dont les principales missions, définies strictement par la loi, sont :
- Le contrôle des comptes annuels débouchant sur leur certification (sans ou avec réserve) ou leur absence de certification ;
- L’alerte des dirigeants puis des associés et du tribunal de commerce si la pérennité de l’entreprise est compromise.
Il est tenu à un rigoureux secret professionnel et ne peut prendre part à la gestion de l’entreprise contrôlée.