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Décentralisation et associations

La note 47 – novembre 2004

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales organise un élargissement des compétences des collectivités territoriales par transfert ou délégation d’une partie de celles exercées jusqu’à présent par l’État[1].

Comme de nombreuses associations poursuivent une œuvre d’intérêt général et bénéficient de financements publics, elles vont devoir s’adapter à ce changement. Et cette adaptation sera d’autant plus perturbatrice que le mouvement de décentralisation est d’ampleur et qu’il est appelé à s’échelonner dans les temps, voire à se développer.

Il importe donc de prendre connaissance des principales modifications qui peuvent concerner les associations en passant en revue les transferts ou délégations de compétences (l’on a exclu de cette énumération les équipements qui ne visent que peu les associations) et en examinant les principales modalités de ce transfert.

LES COMPÉTENCES CONCERNÉES

Développement économique (article 1 de la loi)

Le rôle économique de la région est renforcé en ce qu’elle est désormais chargée d’assurer la coordination des actions des collectivités territoriales et d’en établir le bilan annuel. En outre, elle peut se voir confier par convention avec l’État, l’élaboration du schéma régional de développement.

Les autres collectivités territoriales peuvent désormais intervenir en ce domaine sur simple accord de la région (sans qu’il soit besoin de passer par une convention).

Tourisme (articles 3 à 7 de la loi)

La distinction entre offices du et de tourisme est supprimée pour ne conserver que les derniers.

Le nouvel article L. 2231-9 du CGCT autorise chaque commune ou EPCI compétent à créer un tel office et à définir son statut, ce qui laisse supposer qu’il ne s’agira pas forcément d’un établissement public.

La formation professionnelle (articles 8 à 15)

La compétence en matières de formation professionnelle et d’apprentissage est désormais pleinement confiée aux régions.

Il leur appartient d’adopter le plan régional de développement des formations professionnelles et de s’assurer de sa mise en œuvre.

Si le transfert des activités et des financements de l’AFPA par les régions est prévu progressivement à échéance de 2008, il peut cependant intervenir avant, par convention entre la région et l’État.

La région récupère aussi la compétence pour organiser le réseau des centres et points d’information et de conseils pour la validation des acquis de l’expérience.

Dans le domaine de l’apprentissage, la région aura en charge d’organiser les formations qualifiantes et garantira un accès aux stages de formation. Elle procédera aussi à l’enregistrement des déclarations des employeurs qui souhaitent recourir à l’apprentissage et à celui des contrats d’apprentissage.

L’action sociale et médico-sociale (article 49 à 58)

Le rôle majeur du département dans les domaines de l’action sociale et médico-sociale est renforcé, en ce qu’il en devient le véritable « chef de file » :

  • pour l’action sociale, il lui appartient de la définir et la mettre en œuvre, en concertation avec les organismes concernés et en coordonnant l’ensemble des interventions ;
  • l’initiative, le pilotage et la responsabilité du schéma départemental d’organisation sociale et médico-sociale lui reviennent ;
  • il récupère l’entière responsabilité de l’attribution d’aides aux jeunes en difficulté et de la mise en place du nouveau fonds départemental d’aide ;
  • pour les personnes âgées, le département définit la politique et assure la coordination gérontologique ; c’est ainsi que les l’autorisation et le financement des centres locaux d’information et de coordination lui sont transférés ; le comité départemental des retraités et des personnes âgées est placé sous l’autorité du président du conseil général ;
  • le président du conseil général se voit attribuer la compétence pour réduire ou remettre des dettes des allocataires du « RMI ».

Pour ce qui concerne la formation des travailleurs sociaux, elle revient à la région qui aura ainsi en charge l’agrément et le financement des établissements dispensant ces formations.

La protection judiciaire de la jeunesse (article 59)

C’est à titre expérimental que les départements peuvent se voir confier, par convention avec l’État et sur leur demande, la mise en œuvre des mesures judiciaires de placement des enfants décidées sur le fondement des articles 375-2 à 375-5 du code civil (placement ailleurs qu’auprès d’une personne physique ou en établissement spécialisé pour les troubles mentaux. Dans ce cas, l’habilitation des établissements à recevoir les mineurs sera donnée par le président du conseil général.

La santé (articles 69 à 73)

Les régions se voient confier des responsabilités nouvelles en matière de santé en ce qu’elles :

  • participeront aux commissions exécutives de l’ARH : deux sièges avec voix consultative ;
  • pourront participer, par convention avec l’ARH, au financement et à la réalisation d’équipements sanitaires, ce qui leur donnera des voix délibératives dans la commission exécutive de l’ARH ;
  • prendront en charge l’autorisation et la création des écoles et instituts de formation aux professions paramédicales et de sages-femmes ainsi que leur coût de fonctionnement et l’attribution d’aides aux élèves et étudiants ;
  • assureront l’équipement et le fonctionnement des centres de formation des préparateurs en pharmacie hospitalière.

L’État reprend à son compte les compétences précédemment confiées aux départements dans le domaine de la lutte contre les grandes maladies en laissant toutefois la faculté aux départements et aux collectivités territoriales d’œuvrer en ce sens.

Quant au département, il se voie confier la pleine responsabilité de la réalisation des opérations de lutte contre les moustiques.

Le logement social (article 60 à 65)

La possibilité est offerte au préfet de déléguer tout ou partie de son contingent de réservation de logement sociaux à la commune ou à l’EPCI (compétent en matière d’habitat et si le maire en est d’accord) de leur implantation.

Une délégation est possible, par voie de convention conclue avec l’État, de déléguer aux EPCI dotés d’un « PLH » (plan local de l’habitat) ou aux départements les procédures d’attribution des aides à la pierre en faveur de la construction, de l’acquisition, de la réhabilitation de logements locatifs sociaux, les aides à la rénovation de l’habitat privé (ANAH), à la location accession et à la création de places d’hébergement (pour l’outre-mer, l’accession sociale à la propriété est aussi visée). Une convention comparable peut être conclue avec l’ANRU pour la délégation de gestion de ses concours financiers.

La compétence du « FSL » (fonds de solidarité pour le logement) est transféré au département : l’on passe ainsi d’une délégation à un transfert de compétence.

Pour le logement des étudiants, la compétence est transférée aux communes ou aux EPCI (la région, pour l’Île-de-France) qui en font la demande : dans ce cas, les biens appartenant à l’État sont transférés mais il doivent continuer à être gérés par les CROUS dont les conseils d’administration accueilleront les communes ou les EPCI. Les nouveaux logements construits ne seront pas soumis à cette mesure.

L’enseignement (article 75 à 94)

Un conseil territorial de l’éducation nationale est créé qui comprendra des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements et constituera l’instance consultative en ce domaine. Sur le plan local, la faculté est ouverte aux conseils académiques de siéger en formation restreinte.

Le conseil municipal est chargé de définir les secteurs de recrutement des écoles qui sont sur son territoire. Si un EPCI s’est vu transférer la compétence et la charge du fonctionnement des écoles, il décide alors sur ce point.

Le département se voit attribuer la compétence de définition du ressort des collèges, avis pris du conseil départemental de l’éduction nationale et l’affectation des élèves dans les établissements continuant à être assurée par l’État.

Les départements et les régions seront désormais pleinement responsables de l’accueil, de la restauration, de l’hébergement, de l’entretien général et technique des établissements dont ils ont la charge. Corrélativement, ils récupèrent la pleine propriété de collèges et lycées et deviendront employeurs des personnels techniques. Enfin certains établissements à statut particulier (7 lycées et 5 collèges à sections bi-nationales ou internationales) rentrent dans le droit commun.

Les établissements municipaux ou départementaux d’enseignements sont transformés en établissement publics d’enseignement (29 établissements sont concernés). Pour éviter un trop brusque transfert de charges en découlant, les départements peuvent conserver, six ans au plus, la charge du financement de ces établissements.

Les communes ou les EPCI compétents vont pouvoir créer, à titre expérimental, des établissements publics d’enseignement primaire.

S’agissant des EPCI qui sont compétents en matière de fonctionnement des écoles, leur territoire est pris en compte, au lieu de celui des communes, pour la répartition intercommunale des charges. Ils sont, au surplus, substitués aux communes pour toutes les relations avec les établissements d’enseignement privé sous contrat d’association ou sous contrat simple.

La participation des communes aux dépenses de fonctionnement des écoles privées constitue désormais une dépense obligatoire. Les mesures décidées par les EPCI et les caisses des écoles en faveur des enfants sont prises sans considération du caractère public ou privé de l’établissement fréquenté.

La faculté est offerte à l’État et aux collectivités territoriales de conclure des conventions pour développer des activités communes dans le domaine éducatif et culturel. A cet effet, des « GIP » (groupement d’intérêt public) peuvent être constitués.

La culture (articles 95 à 102)

La mission d’inventaire général du patrimoine culturel est confiée aux régions qui peuvent s’appuyer sur les collectivités territoriales, par voie de convention, pour la mener. Les personnels des associations qui oeuvrent actuellement dans ce secteur pourront être recrutés par les collectivités territoriales, en charge de cette mission.

Les collectivités territoriales pourront demander à devenir propriétaire des certains monuments historiques de l’État ou du centre des monuments nationaux ainsi que de meubles. Qu’il s’agisse d’immeubles ou de meubles, la liste en sera dressée par décret.

A titre d’expérimentation, les régions et les départements pourront se voir confier la gestion des crédit d’entretien et de restauration des immeubles, orgues et objets mobiliers protégés qui n’appartiennent pas à l’État, selon des modalités qui seront définies par convention.

Dans le domaine artistique, les communes et leurs groupements se voient confirmer dans leur rôle d’enseignement dispensé en vue d’une pratique d’amateur et de collaboration avec les établissements scolaires pour la fourniture d’une offre d’éducation artistique. Les départements se voient confier l’établissement des schémas départementaux de développement des enseignements artistiques et les régions, avec leur compétence en matière de formation professionnelle, l’organiseront et la prendront en charge.

UNE DÉCENTRALISATION PROGRESSIVE

Si certaines des compétences visées par la loi sont purement et simplement transférées aux collectivités territoriales, d’autres sont seulement déléguées, le cas échéant dans le cadre d’une expérimentation. L’on peut raisonnablement penser que ces mécanismes de délégation de compétences ont été mis en place dans une perspective à moyen ou long terme d’un transfert progressif de compétences.

Dans certains cas, même si les modalités de répartition des compétences entre les collectivités territoriales sont évoquées par la loi, celle-ci ne tranche pas sur le point du renforcement de l’intercommunalité. Pour ne prendre qu’un exemple, le préfet pourra choisir de déléguer son contingent de réservation de logements sociaux à la commune ou à l’EPCI de leur implantation. Autrement dit, la construction de l’intercommunalité reste du domaine de la concertation locale, même si l’État peut être à l’origine d’incitations plus ou moins fortes.

L’importance des transferts (ou des délégations) de compétences qui sont visées dans la loi fait que très peu de dispositions sont immédiatement applicables. Il ne s’agit que de celles relatives : aux fonds structurels européens, à la remise et la réduction de créances en matière de « RMI » ; à la réactualisation des « PLH » et aux adaptations du fonctionnement des communes et des « EPCI ».

Pour plusieurs des compétences transférées, il faudra attendre le 1er janvier 2005. Et la raison principale en est que la charge de ces compétences transférées devra trouver un financement. Si la compensation en est bien prévue, il a été fait application du principe de l’annualité budgétaire et il faudra que la loi de finance pour 2005 la mette en œuvre. De leur côté, les collectivités territoriales et leurs groupements devront, d’ici là, envisager leur budget pour 2005 en prenant en compte ces nouvelles compétences. Les compétences visées sont : le développement économique, le tourisme, la formation professionnelle, l’action sociale et médico-sociale, le logement pour les étudiants, la santé et la formation de leur personnel, l’enseignement et le transfert des personnels techniques et l’inventaire du patrimoine culturel.

Enfin, dans la plupart des domaines, des décrets sont attendus pour définir plus précisément les modalités de ces transferts (ou délégations) de compétences : formation professionnelle, formations sociales, aides à la pierre, comité régional de l’habitat, fonds de solidarité pour le logement, logement pour les étudiants, protection sanitaire, lutte contre les insectes, formations para-médicales, conseil territorial de l’éducation nationale, établissements publics locaux d’enseignement (y compris d’enseignement primaire), monuments historiques (liste et gestion des crédits), enseignement artistique.

CONCLUSION

Si la décentralisation amorcée depuis plus de vingt ans maintenant a largement contribué au développement des activités du secteur associatif, l’on constate qu’elle est loin d’être achevée. La première conséquence que l’on peut en tirer est que les liens entre les associations et les collectivités territoriales ne pourront, au fil du temps, que se renforcer.

Mais il est aussi certain que de telles modifications, qui comportent à la fois de la complexité et des délais de mise en œuvre, ne vont pas faciliter la gestion des associations qui devront s’adapter à ces évolutions permanentes.
[1] – Voir aussi, à ce sujet, la circulaire « NOR/LBL/B04/10074/C » du 10 septembre 2004 qui commente la loi.

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