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Nouvelle fiscalité des bailleurs sociaux : favoriser les fusions entre SEM et HLM ?

Billet 2005-10-18

Introduction

Les pouvoirs publics ont, ces derniers temps, entamé la réforme du logement social et les textes n’ont pas manqué qui traduisent ce mouvement. L’on sait aussi que la volonté est de procéder à un regroupement des bailleurs sociaux, estimés trop nombreux, surtout pour ceux de petite taille.

Il est possible que la réforme de la fiscalité des bailleurs sociaux, telle qu’elle est actuellement en cours de finition (l’instruction n’existe, pour l’heure, qu’en projet) favorise le regroupement des petites SEML immobilières avec les « ESH ».

Les développements qui suivent visent à examiner la situation au regard des fusions des SEML avec les « ESH » selon les étapes suivantes :

  • rappel des principes ;
  • les apports de la réforme, au cas particulier.

1-         Rappel des principes

Si des dispositions fiscales de faveur existent en matière de regroupement de sociétés, encore faut-il qu’il s’agisse d’une fusion, au sens de la réglementation fiscale.

1.1.      La définition des opérations de fusion

La fusion

Une fusion est l’opération régie par la loi sur les sociétés commerciales par laquelle deux sociétés se réunissent pour n’en former qu’une seule. Elle peut être réalisée :

  • au moyen de la création d’une société nouvelle,
  • par l’absorption d’une société par une autre.

 

La loi sur les sociétés commerciales décrit en termes généraux les effets de la fusion :

  • la fusion entraîne la dissolution sans liquidation de la société qui disparaît et la transmission universelle de son patrimoine à la société bénéficiaire des apports,
  • simultanément, les associés de la société qui disparaît acquièrent la qualité d’associés de la société absorbante ou nouvelle, selon les conditions fixées par le contrat de fusion. Les associés de la société qui disparaît sont ainsi, pour reprendre l’exigence fiscale, rémunérés de l’apport consenti par échange de droits sociaux.

Entre sociétés passibles de l’impôt sur les sociétés

Dès lors que la fusion touche des sociétés – ou même des entreprises – passibles de l’impôt sur les sociétés, elle est admise au régime fiscal de faveur.

Sont à considérer comme étant passibles de l’impôt sur les sociétés, les personnes morales visées à l’article 206 du code général des impôts, c’est-à-dire celles :

  • soumises de plein droit à cet impôt comme les sociétés anonymes, à responsabilité limitée… ainsi que les associations qui relèvent d’un impôt sur les sociétés adapté ou qui ont une gestion qui n’est pas désintéressée…
  • ou qui ont opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux comme, par exemple, les sociétés en nom collectif,
  • qui ne paient pas cet impôt parce qu’elles en sont exonérées au titre des articles 207 à 208 sexies du code général des impôts (sauf 208 quinquies) ; sont notamment visées à ce titre les SA d’HLM qui sont exonérées d’impôt sur les sociétés (article 207-1-4°) sur toute leur activité et les SEML qui sont normalement soumises à cet impôt sauf pour les résultats de certaines de leurs opérations (articles 207-1-6° bis et 207-1-7°).

1.2.      Les droits d’enregistrement

Aux termes de l’article 816 du code général des impôts, les opérations de fusion sont enregistrées moyennant la perception d’un droit fixe qui est actuellement de € 230 (somme portée, à compter du 1er janvier 2006 à € 375, dans la généralité des cas et à € 500, pour les sociétés dont le capital excède € 255.000).

Les seules conditions fixées par la réglementation sont relatives à la définition de l’opération de fusion, telle qu’exposée ci-dessus.

1.3.      L’impôt sur les sociétés

Le principe général est celui de la neutralité fiscale des fusions au regard de l’impôt sur les sociétés. Il comporte cependant des modalités de mise en œuvre.

En matière d’imposition du résultat, le régime de faveur prévu à l’article 210 A du code général des impôts se traduit, pour la société absorbée, par l’exonération des plus‑values de fusion et l’absence de taxation des provisions. Cette exonération n’est possible qu’en contrepartie de l’engagement de la société absorbante :

  • de reprendre au passif de son bilan les provisions dont l’imposition est différée,
  • de calculer, en cas de cession des éléments non amortissables apportés lors de la fusion, les plus‑values sur la base de leur valeur d’origine au bilan de la société absorbée,
  • de réintégrer dans ses bénéfices imposables au taux de droit commun les plus‑values sur éléments amortissables, étant précisé que l’amortissement de ces plus-values peut être pratiqué et déduit des résultats taxables.

En d’autres termes, la neutralité fiscale de la fusion revient à exonérer la société absorbée d’impôt au titre des plus-values dégagées lors de la fusion et à en transférer la charge sur la société absorbante.

2-         L’apport de la réforme

2.1.      L’absorption d’une société payant l’impôt par une société ne le payant pas

L’absorption d’une société effectivement soumise à l’impôt sur les sociétés par une société qui en est exonérée dégageant des plus-values remettrait en cause l’économie même du régime de faveur des fusions.

C’est, en effet, que les plus-values risqueraient d’échapper à l’impôt sur les sociétés :

  • parce que l’absorbée ne paierait rien à ce titre à raison des dispositions du régime de faveur
  • et parce que l’absorbante serait exonérée d’impôt sur les sociétés.

Il faut noter que cette caractéristique, introduite en 1995 par l’administration (D. adm. 4I-122, n° 2 s. du 1er novembre 1995), a pu faire obstacle au regroupement des SEML et des SAHLM par voie de fusion.

 

2.2.      Les apports des réformes en cours

Depuis cette date, les choses ont été précisées, la réglementation a changé ou est en cours de changement et la solution est plus nuancée.

Pour que l’impôt soit éludé, encore faut-il que des plus-values soient dégagées au moment de la fusion. Or si l’on procède à des apports estimés pour leur valeur comptable, la question ne se pose pas. Et, de ce point de vue, l’avis n° 2004-01 du 25 mars 2004 du Conseil national de la comptabilité est important car les règles qu’il fixe pour la détermination de la valeur d’apport sont opposables à l’administration fiscale.

La réglementation fiscale posait le principe que les apports de la société absorbée à la société absorbante sont faits pour leur valeur réelle. Toutefois, il était admis de retenir la valeur comptable aux deux conditions suivantes :

  • les apports restent soumis au régime de faveur des fusions,
  • l’absorbante reprend dans son bilan les écritures comptables de l’absorbée (valeur d’origine, amortissements…).

Et l’on peut penser que cette disposition vaut encore pour les fusions et opérations assimilées qui ne relèvent pas de l’avis précité du Conseil national de la comptabilité de 2004. Il faudra sans doute attendre l’instruction fiscale annoncée pour l’automne 2005 pour disposer de plus d’informations sur ces questions.

Plus précisément, ce qui était visé dans la restriction apportée à l’application du régime de faveur était le cas d’une activité effectivement soumise à l’impôt sur les sociétés chez l’absorbée à raison de son statut et qui s’en trouverait exonérée chez l’absorbante, de statut différent. Or, avec la réforme de la fiscalité des bailleurs sociaux qui prend effet au 1er janvier 2006, l’on constate une harmonisation, certes partielle, de l’impôt sur les sociétés des SEML immobilières et des organismes HLM. Autrement dit, la restriction apportée par l’administration fiscale tenant à sa crainte d’un traitement différent d’une même activité selon qu’elle est exercée par une personne soumise ou non à l’impôt sur les sociétés devient d’une portée plus limitée. Mais, selon le projet d’instruction fiscale produit pour l’application de cette réforme des bailleurs sociaux, une difficulté demeure et qui n’est pas des moindres puisqu’elle prévoit une différence de traitement selon les immeubles. L’exonération d’impôt sur les sociétés est en effet prévue :

  • pour les HLM, pour le parc construit depuis 1977 (la réforme des financements aidés) qui est conventionné (conventionnement « APL » ou convention globale de patrimoine ») et pour le parc construit avant 1977, qu’il soit ou non conventionné ;
  • pour les SEML, les immeubles visés sont ceux conventionnés.

Pour les immeubles construits par une SEML avant 1977 et qui ne sont pas conventionnés, leurs résultats relèvent de l’impôt sur les sociétés. En cas de transfert à un organisme HLM, ils risqueraient d’être incorporés à un parc qui bénéficie de l’exonération fiscale. Ici le risque existe donc que, pour la même activité, le traitement fiscal soit différent selon qu’elle est exercée par un organisme HLM ou une SEML.

Mais une solution pratique existe qui consiste, pour l’organisme HLM qui récupérera ce parc immobilier, à l’intégrer à son secteur fiscalisé, c’est-à-dire à soumettre ses résultats à l’impôt sur les sociétés. Et l’on se trouvera alors dans une situation simple puisque un parc imposable chez la SEML le sera aussi chez l’organisme HLM.

Conclusion

En définitive, le régime fiscal de faveur des fusions peut parfaitement trouver application au cas du regroupement d’une SEML et d’un organisme HLM, dès lors qu’il est nettement procédé à une bonne délimitation du parc immobilier pour savoir s’il doit ou non être intégré au secteur fiscalisé de l’organisme HLM.

Bien entendu, il serait plus confortable pour les entreprises qui envisagent un tel regroupement de disposer de précisions de la part de l’administration fiscale pour confirmer ou infirmer cette approche et, plus généralement, pour indiquer si le regroupement des SEML et des HLM est réellement encouragé.

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