Billet 2004-05-20
Le cas
Le cas soumis est simple : celui d’une opération d’aménagement dont les caractéristiques (renouvellement urbain oblige) font que presque toutes les recettes seront des subventions publiques, les constructeurs (des bailleurs sociaux) ne supportant pas de charge foncière dans leur bilan d’opérations.
Les textes
La sixième directive européenne sur la TVA prévoit expressément que sont incluses dans la base d’imposition à la TVA les « subventions directement liées au prix des opérations », étant précisé que la subvention peut couvrir tout ou partie du prix de l’opération. La subvention « complément de prix » est caractérisée par :
- le principe de son versement qui existe, en droit ou en fait, avant que n’intervienne le fait générateur de l’opération taxable (en l’occurrence, le principe des subventions publiques existera avant même que la première vente soit conclue) ;
- une relation entre la subvention et les ventes réalisées ou à réaliser (en d’autres termes, les ventes ne sont possibles qu’à un prix très inférieur au « marché ») ;
- le fait qu’elle complète, voire remplace, le prix de vente des prestations ou des biens (il va de soi que l’on lance l’opération dont on sait que les seules ventes possibles sont à un prix inférieur au coût de revient parce que l’on a des espérances raisonnables de percevoir les subventions).
Comme habituellement en la matière, la situation de fait et les circonstances sont déterminantes dans l’attribution de la qualification de subvention « complément de prix ». Il est peu douteux, dans le cas d’espèce, que l’on se trouve en présence de telles subventions.
Comme l’on sait qu’une opération d’aménagement est considérée, au moins du point de vue fiscal, comme consistant en la production de terrains à bâtir et que cette activité relève de la TVA, il faut bien envisager le traitement de la TVA sur ces subventions. La règle en la matière est que la TVA est calculée selon les mêmes modalités que celles applicables au prix que ces subventions publiques complètent ou remplacent. En d’autres termes, si le prix est soumis à une TVA à 19,6 %, la TVA est à collecter au même taux et si le prix est exonéré de TVA, la subvention l’est aussi.
Application
Si l’on reste sur les principes, la simplicité est de mise, même dans le cas où les subventions publiques couvrent des insuffisances de prix relevant de modalités d’imposition à la TVA différentes (taux et exonération). Il faut alors procéder à une ventilation de la subvention entre les différents besoins de financement de l’activité donnant lieu à subvention. Autrement dit, l’on peut estimer, dans une opération d’aménagement, de décomposer les recettes entre les cessions de charges foncières au taux normal de TVA (19,6 %), les cessions au taux réduit (5,5 %) et les cessions exonérées ; la subvention sera ensuite ventilée selon la même proportion et l’on appliquera alors le principe général.
L’on peut imaginer, sans trop d’effort, que ce principe se complique lorsqu’il s’agit de le mettre en œuvre.
- Si les ventes de charges foncières sont prévues pour le franc symbolique, il faut d’abord estimer leur prix « normal » ; bien que l’exercice ne soit pas facile, il reste cependant possible car l’on dispose au moins de la notion de « charge foncière admissible » chez les constructeurs qui peut servir de référence ;
- Compte tenu de l’ancienneté de la mesure, l’on peut supposer que le taux réduit de TVA sur les ventes de terrains à bâtir pour le logement social sera maintenu à l’avenir. Et l’on peut aussi procéder à une estimation raisonnable des cessions relevant du taux normal en les distinguant de celles relevant du taux réduit, les caractéristiques de l’opération d’aménagement étant ce qu’elles sont.
- Mais l’exercice est, peut-être, plus délicat pour ventiler les cessions entre celles effectivement imposées à la TVA et celles qui en seront exonérées, sauf à déjà connaître avec précision les bailleurs sociaux devant intervenir (soit sociétés, soit établissements publics pouvant faire jouer l’article 1042 du code général des impôts).
Une difficulté supplémentaire est à signaler. Il est fort possible que le prix, même normal, des ventes ne suffise pas à couvrir la totalité du coût de l’opération d’aménagement et l’on pourrait alors dire qu’une partie au moins du coût des équipements d’infrastructure n’est pas absorbée par le prix de vente (le prix normal) des terrains. Dans cette hypothèse (que l’on imagine possible, voire probable), les subventions publiques remplaceraient l’habituelle participation de la collectivité initiatrice de l’opération. Et l’on sait que cette participation est passible de la TVA au taux normal. Il n’est pas certain (à mon modeste avis) que l’on puisse faire valoir la logique de la subvention « complément de prix » jusqu’à y inclure le coût des équipements qui n’est pas couvert par le prix de vente. En d’autres termes et en supposant que toutes les cessions de charges foncières soient passibles de taux réduit (avec ou sans exonération), il est fort à craindre qu’il faille prévoir un besoin de financement partiel des équipements qui relève du taux normal.
Pour faire pratique, l’on suggère que l’estimation soit faite des prix de ventes « normaux » des charges foncières et de leur ventilation par taux de TVA (en distinguant les exonérations) de façon à pouvoir établir une proportion qui servira pour le calcul de la TVA pesant sur les subventions. Il reste à servir le tableau suivant :
décomposition des produits | montant | proportion |
ventes de terrains à bâtir avec TVA à 19,6 % | ||
ventes de terrains à bâtir avec TVA à 5,5 % | ||
ventes de terrains à bâtir sans TVA | ||
Sous total des produits théoriques | ||
autres produits taxables | ||
autres produits non taxables | ||
Sous-total des produits | ||
Total des dépenses | ||
« participation » soumise à 19,6 % |
Il sera alors possible de prendre en compte l’incidence de la TVA sur le bilan prévisionnel de l’opération d’aménagement.